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Carnet de route
Imprimable

Saint Jacques de Compostelle.Puy en Velay – Conques en avril 2008

Défilement diaporama

Ultreïa ! (long chemin !) par la voie Podiensis

Voici le carnet de route du chemin qu’Isabelle et Alain ont suivi au mois d’avril de l’an de grâce 2008.
Ce chemin et quel chemin? Celui qui nous mène à Saint-Jacques de Compostelle? Certainement, mais pas seulement car c’est avant tout celui de nos vies avec tout ce que cela comprend. Ce chemin est à son image avec ses joies : les rencontres et les lieux fréquentés ; avec ses peines : les difficultés de la route et le poids du sac. Ce chemin nous fait redécouvrir notre existence dans sa plus grande authenticité. Il nous permet de retrouver des valeurs simples comme la solidarité, l’humilité… Chemin spirituel et historique fait de rencontres inoubliables, fait de moments difficiles, de moments de grâce..
Ce n’est pas un chemin comme les autres, mais une démarche personnelle qui se vit plus qu’elle ne se raconte….

Lundi 21 avril

Ce matin nous quittons notre vie quotidienne pour cette aventure pédestre et idéologique, arrivée à Clermont il y a déjà quelques pèlerins sur le quai qui attendent la correspondance pour Le Puy.
Le car nous dépose devant la gare, il est 6h du soir. Nous allons remonter toute la vielle ville jusqu’au gîte St François qui se trouve derrière la cathédrale. C’est une ancienne maison bourgeoise qui fût transformée en maison religieuse, l’accueil est sympathique et notre chambre spacieuse. De la fenêtre nous avons un très joli panorama sur la vieille ville.
Après un repas de fête dans un beau resto de la ville, la nuit sera réparatrice avant le grand départ demain matin.

Mardi 22 Avril : Le Puy en Velay – Saint Christophe sur Dolaizon

Nous nous levons à 6h, le jour pointe son nez derrière les tours de la cathédrale. Petit déjeuner en compagnie d’autres pèlerins qui, comme nous, commencent leur première journée de ce chemin qui est si long. Nous échangeons quelques paroles :
« vous allez jusqu’où ?, vous venez d’où ?, …. ».
Au Puy en Velay, avant de prendre le chemin, il est de tradition d’aller à la bénédiction des pèlerins à 7h à la Cathédrale Notre Dame du Puy, sanctuaire marial dont les origines remontent au Vème siècle.
Dans la nef, nous prenons place parmi ceux que nous avons vu ce matin et ceux du train ou du car qui nous a amené ici, dans cette ville pleine d’histoire du passé.
Les pèlerins à peine réveillés se lèvent et se rassoient au rythme de l’office, peut-être croiserons nous notre voisin sur le chemin.. L’office terminé, le prêtre réunit tous les participants autour de la statue de Saint Jacques. Chacun va se présenter et dire d’où il vient, jusqu’où il va ; nous sommes surpris de voir le nombre de marcheurs qui iront jusqu’à Compostelle. Certains viennent de loin : Brésil, Chine, d’autres sont partis à pied de chez eux et ont de ce fait déjà marché un, deux ou trois mois !..
Chacun reçoit une médaille de la vierge du Puy, que cette médaille nous porte bonheur le long du chemin. Nous allons chercher nos créanciales à la sacristie, c’est un document remis par une autorité religieuse que nous ferons tamponner chaque jour à notre étape ; elle nous permettra lors de notre arrivée à St Jacques de Compostelle d’obtenir la fameuse Compostella (document officialisant le pèlerinage).
Avant de partir, nous demandons à une sœur la possibilité de visiter la cathédrale du Puy… pas une visite touristique mais une visite spirituelle. Nous nous imprégnons de l’histoire que représente ce lieu et de ce chemin qui nous mènera au champ des étoiles (Compostelle). Après quelques moments passés dans le cloître, nous nous retrouvons en haut de marches, et là c’est vraiment impressionnant ! Je me rends compte que je ne suis pas parti pour une randonnée itinérante comme j’ai l’habitude de faire mais pour un chemin de partage, un chemin spirituel, un chemin qui est emprunté depuis des siècles. Depuis que Godescalc, évêque du Puy-en-Velay, en 950 ou 951 s’est rendu à Saint-Jacques-de-Compostelle, et a créé ce qui devait devenir une route de pèlerinage au Moyen Âge.
Nous voici parti sur ce chemin, nous traversons le Puy par la rue principale, un vieux monsieur sur un trottoir nous dit « Ultreïa » (long chemin), nous sommes heureux et bien à la fois. Nous quittons le Puy par des rues qui montent sur un plateau, en nous retournant superbe panorama sur la ville, la cathédrale, les toits…
Le chemin est bien balisé, même de trop par endroit, c’est impossible de se perdre.. guides, cartes etc., ne servent à rien..
Cet après-midi nous rencontrons un couple vu ce matin à la cérémonie, nous ne les reverrons plus. Le chemin est assez court aujourd’hui, histoire de se mettre en jambe pour les jours suivant. Nous arrivons assez tôt à Saint Christophe sur Dolaizon, le gîte tenu par Mme Allègre est très bien et spacieux. Nous avons une chambre pour nous deux et profitons de l’après-midi pour se reposer ; le soir délicieux repas avec les produits de la ferme.
Extinction des feux de bonne heure car demain sera une autre histoire.

Mercredi 23 Avril : Saint Christophe sur Dolaizon – Monistrol d’Allier

Nous nous levons vers 7h30 pour partir vers 9h, petit déjeuner copieux. Cette halte fût vraiment bien de par l’accueil, le logis et la table. Après avoir fait tamponner nos créanciales nous reprenons le chemin qui n’est pas difficile ce matin car peu de dénivelé jusqu’au village de Montbonnet où nous croisons une très jolie chapelle (Saint Roch), petite chapelle de style roman ouverte aux pèlerins, j’écris un message sur le livre d’or histoire de laisser trace de notre passage.
Le chemin de Saint Jacques est parsemé de chapelles ouvertes aux pèlerins et de calvaire, il est de tradition de déposer une pierre devant chaque calvaire au pied de la croix. Ce que je fis en pensant à ma nièce Clara qui se battait contre la maladie.
Très longue descente jusqu’à Saint Privas d’Allier où nous montons par les anciennes rues du village pour visiter l’église. Sur le livre d’or j’y inscris : « Ici nous avons fait une halte sur le chemin des étoiles ». Nous rencontrons une famille avec deux enfants qui n’ont pas 10 ans, ils font un bout du chemin en faisant des petites étapes.
Le chemin descend très raide entre rochers et cailloux pour nous amener à Monistrol d’Allier le terme de cette étape. Le village est très encaissé et assez sombre car le soleil a du mal à atteindre les rues du village.
Le gîte est très agréable, nous rencontrons d’autres pèlerins et racontons nos histoires de pèlerins. Le dîner est pris en commun, moment de partage… Deux dames d’un certain âge iront jusqu’à Saint Jacques en prenant le temps qu’il faudra pour atteindre leur but. Il y a un Allemand avec qui nous parlons un peu en anglais, tous les ans (c’est la quatrième fois), il prend des vacances prolongées pour faire Saint Jacques.
J’ai découvert que la majorité des gens qui font ce chemin ne randonnent pas le reste de l’année, ils ne marchent que pour Saint Jacques. C’est étonnant car sans entraînement ou très peu le corps humain s’adapte très vite aux situations où il se trouve.
Nuit en dortoir avec des ronfleurs, mais nous sommes tellement fatigués que cela ne nous gêne pas.

Jeudi 24 Avril : Monistrol d’Allier – Le Falzet

Ce matin lever tôt car le chemin est assez long pour nous amener au terme de l’étape du jour. Petit déjeuner avec le groupe de la veille puis tout le monde part en espérant se revoir peut-être un jour sur ce chemin, moi je ne pense pas car ce sont de grands marcheurs et leurs étapes sont beaucoup plus longues que les nôtres.
Après quelques courses pour ce midi, nous quittons ce village sans trop de remord car un peu triste et gris de par les maisons mais aussi l’atmosphère ambiante. Cette journée sera la plus difficile de notre périple car très longue avec beaucoup de dénivelé. D’ailleurs nous commençons par une montée très raide sur 500 mètres ; à mi-chemin de la côte il y a une chapelle accolée au rocher, étrange elle est fermée.
Nous sommes sur le plateau du Gévaudan, les forêts sont sombres et nous imaginons voir sortir la bête derrière chaque futaie.. Je continue à poser une pierre à chaque calvaire en espérant que mes prières seront exhaussées. Car nous sommes valides et en pleine santé et je pense souvent à mes proches malades où plus en condition physique et qui aimeraient être tellement à notre place..
Isabelle et moi marchons souvent loin l’un de l’autre, cela nous permet de méditer, de penser à l’avenir, à nous, aux autres… ceux que nous avons laissés en partant.
Peu après Saugues nous sommes doublés par un type que nous avons vu hier soir au gîte, quelques mots échangés et le voilà parti devant nous.
Encore une dizaine de kilomètres sur un plateau parsemé de sapins avant d’arriver au gîte du Falzet. La patronne, Mme Delcros, est une femme très accueillante et son gîte est vraiment bien, situé au milieu d’un paysage magnifique et dans l’enceinte d’un ancienne ferme toujours en activité.
Il y a une grande salle commune, une salle de bain et plusieurs chambres. Autour de la table nous faisons connaissance, chacun raconte ses histoires de pèlerins. Ce soir autour de la table, il y a une jeune femme chinoise qui vit à Pékin et qui fait ses études d’art plastique en France ; elle n’est pas chrétienne mais bouddhiste, elle est attirée par ce chemin de par son côté mythique. Nous retrouvons, également, une femme que nous avions vu le premier matin au Puy en Velay. Soirée chaleureuse et joyeuse autour d’un bon repas fait à partir des produits de la ferme de Mm Delcros.

Vendredi 25 Avril : Le Falzet - Saint Alban de Limagnole

Levé tôt car encore une longue journée mais moins difficile que celle d’hier. Après un copieux petit déjeuner, nous quittons ce gîte sans oublier de dire au revoir à la patronne. Nous voici de nouveau sur ce chemin avec le soleil qui sera avec nous toute la journée. Encore une montée qui nous amène à 1300 mètres sur un plateau où des chevaux courts avec leurs petits dans une prairie d’un vert éclatant parsemé de fleurs bleues et jaunes. Au milieu de cette prairie il y a une petite maison de pierres (un buron), une rivière coule à ses côtés. C’est vraiment un endroit où s’arrêter et rêver, qu’elle est belle cette nature. Surtout ne pas y toucher que l’on puisse encore et encore voir de si beau paysage !
Tout au bout de ce plateau il y a une ancienne domerie, ces bâtiments étaient utilisés au moyen-âge comme hospice pour accueillir les pèlerins malades ou blessés. Aujourd’hui c’est une immense ferme qui fait également gîte d’étape pour les pèlerins qui le soir venu peuvent faire une halte ici.
Nous continuons notre chemin et passons devant un oratoire (Saint Roch) en mémoire d’un hospitalet datant du moyen-âge, c’est dans des moments comme celui-ci que nous réalisons que des millions de marcheurs depuis la nuit des temps ont parcouru ces chemins que nous parcourrons aujourd’hui.
Ce soir nous faisons halte dans un hôtel qui fait également gîte mais nous demandons une chambre pour passer une bonne nuit car les dortoirs c’est bien mais un peu brillant et le sommeil pas tout à fait réparateur.
Ce soir au dîner nous nous installons avec des pèlerins que nous n’avons jamais vus. Il y en a un qui transporte un masque à oxygène dans son sac car il a des problèmes de respiration, un autre qui fait le chemin pour changer de vie car il a perdu son épouse il y a peu de temps.
La jeune femme chinoise, Yu, nous l’avons rencontrée aujourd’hui. Son parcours est vraiment curieux, elle ne prend pas de photos mais lorsque le paysage lui plait elle s’arrête prend ses crayons et dessine ce qu’elle voit..
Le chemin de Saint Jacques, c’est aussi cela : le brassage de différentes personnes, de différentes motivations.

Samedi 26 Avril : Saint Alban de Limagnole – Aumont-Aubrac

Après une grasse matinée et un copieux petit déjeuner, nous partons sous un soleil radieux pour 14 kilomètres… journée de repos !
Sur le chemin nous rencontrons un couple croisé quelques jours avant, nous échangeons quelques mots. Nous sommes sur les plateaux de l’Aubrac, le paysage est superbe, de grandes étendues désertiques parsemées de pins à flan de vallon.
Nous rencontrons un couple parti de chez eux dans le Haut Doubs, déjà 700km à pied et un mois de marche, ils ont encore deux mois devant eux… nous faisons quelques pas avec eux puis marchant plus vite, les voilà partis devant nous.
Vers 16h nous arrivons à la ferme de Barry, à l’entrée de Aumont-Aubrac, joli bâtiment en pierre de pays.
Ce soir soirée d’exception autour d’un repas de fête : aligot, côte d’agneau et gâteau aux pruneaux. Cadre magnifique et ambiance festive. Joyeux repas en compagnie d’un monsieur et son neveu avec qui nous parlons beaucoup, à notre table il y a aussi deux belges qui font le chemin pour la cinquième fois ! Faire ce chemin une fois, donne peut-être envie de la faire une nouvelle fois, et encore…
Cela fait cinq jours que nous sommes partis, nous avons prévu de nous arrêter à Conques dans six jours et je commence à vouloir continuer…
Demain, une autre journée : marche, pose repas, méditation, gîte, repas en commun, … c’est tellement simple que c’est formidable.. Nous avons besoin de cela, de cette simplicité à notre époque pour se débrancher de la vie moderne et se retrouver.
Bon, c’est l’heure d’aller dormir, à demain !

Dimanche 27 Avril : Aumont-Aubrac – Prinsuéjols (fermes des Gentianes)

Après le petit déjeuner copieux (oranges, confitures maison, pain grillé,…) pris en compagnie des autres personnes du gîte, Vincent le patron du gîte nous souhaite bon chemin.
Après la visite traditionnelle de l’église du village, nous reprenons le chemin. Nous traversons un très joli village et près de son église nous retrouvons Antoine et Frédéric ainsi que Bernadette que nous avions rencontrés au gîte du Falzet, il y a quelques jours.. Nous allons faire un bout de chemin ensemble. Frédéric à mal aux genoux depuis quelques jours, Isabelle va lui prêter ses bâtons pour la soulager un peu et lui permettre de continuer le chemin, nous les retrouverons à Conques à l’auberge Saint Jacques au terme de notre périple.
Pour déjeuner nous nous arrêtons sur les hauts plateaux de l’Aubrac, Le paysage est à couper le souffle, immense étendue désertique vallonnée parsemée de sapins.
Le vent se lève et souffle de plus en plus fort, espérons qu’il ne nous emmènera pas la pluie…
Ce soir faisons halte à la ferme des gentianes, maisons isolées sur le plateau de l’Aubrac. Il est tôt et la maison est fermée, nous allons attendre et faire une sieste méritée sur la pelouse près de la maison. Quel calme, il n’y a que le vent, les oiseaux et nous.. mais bon… vivre ici ce n’est pas tous les jours facile et surtout ce n’est pas notre vie.
Ce soir repas sympa entre pèlerins et touristes sans plus. La nuit venue, la pluie commence à tomber et tombera toute la nuit, demain il va falloir sortir les affaires de pluie… dommage car la journée et essentiellement sur les hauts plateaux… se sera un autre jour.

Lundi 28 Avril : Prinsuéjols (fermes des Gentianes) - Aubrac

Ce matin au petit déjeuner nous rencontrons des Suisses qui font ce chemin par petites étapes au rythme de leurs pas, il y a également deux néerlandais qui vont jusqu’à Conques ou Cahors. Les Suisses nous parlent beaucoup de l’Angleterre et de l’Ecosse (un pays où j’aimerai bien aller marcher) où ils ont souvent randonné.
Nous n’avons pas franchi la porte pour sortir qu’il commence déjà à pleuvoir, il faut sortir des sacs les tenues imperméables, cela va alléger le sac mais bon, c’est mieux quand il fait beau.
Nous traversons une région entièrement désertique qui dans quelques semaines sera envahie par les vaches, de race « Aubrac » celles qui ont les yeux maquillés. Pas un arbre, pas un bosquet, pas un abri quelconque pour se mettre à l’abri et il pleut de plus en plus fort sans compter des coups de tonnerre au loin.. La grêle remplace la pluie et le vent nous cingle le visage, il est de plus en plus difficile d’avancer dans la tempête et toujours pas d’abri ; la seule solution est d’avancer.. Enfin ! un village : Nasbinals, perdu sur ce plateau. Nous visitons son église de style roman, sans oublier de laisser trace de notre passage sur le livre d’or et allons dans une auberge nous réchauffer devant un café.
La pluie s’arrête, nous en profitons pour repartir mais quelques kilomètres plus loin quelques gouttes commencent à mouiller mon anorak, la pluie redouble d’intensité et nous accompagnera jusqu’au au terme de l’étape à Aubrac. Mais avant, il faut franchir un col à 1400 mètres sous la pluie et dans les nuages, pas de visibilité à plus de 10 mètres… Sur ce plateau il y a une stèle, la phrase suivante y est écrite : « Dans le silence et la solitude, on entend plus que l’essentiel »
Vers 14h30, entièrement trempés nous arrivons au gîte, c’est une ancienne maison de vacances qui devait recevoir au moins une centaine de vacanciers l’été. Couloir immense, salle démesurée pour nous qui sommes seuls.. Nous trouvons quelqu’un dans ce dédale de pièces pour nous montrer notre chambre. Grande chambre en mezzanine avec salon et cuisinette au rez-de-chaussée, ce soir nous ferons notre cuisine mais irons dans la grande salle à manger, en réalité nous avons cette maison pour nous tout seuls…. C’est étrange l’atmosphère qui règne dans ce lieu.
Il faut tout sécher, il y a du linge étendu un peu partout dans la pièce. Cet après-midi farniente, nous trouvons dans la cuisine des sachets de tisane, nous avons des restes de gâteau, il y a des bougies.. avec tout cela on se fait un quatre heure royal, histoire de se remonter un peu le moral.
Ce soir au dîner nous allons faire la connaissance de Natacha et Martins, deux hollandais. Ils sont tous les deux protestants et font le chemin pour histoire culturelle, lui est pasteur à Amsterdam. Nous passons une agréable soirée à parler de nos pays respectifs et des motivations qui nous ont poussées dans cette aventure.
En sortant pour retourner dans nos chambres, la nuit est tombée, quelques étoiles dans le ciel brillent mais le froid est arrivé, s’il devait pleuvoir de nouveau la neige prendra le relais ; on verra demain matin.

Mardi 29 Avril : Aubrac – Saint Côme d’Olt

Ce matin levé de bonne heure car nous avons beaucoup de kilomètres à faire aujourd’hui, je tire les rideaux pour voir le ciel et là quelle surprise… il a neigé cette nuit, quelques centimètre recouvrent le paysage que nous avons du mal à apercevoir car un épais brouillard envahi tout autour de nous. En temps normal avec un temps pareil nous nous recouchons mais là nous devons partir, après le petit déjeuner avec les Hollandais nous reprenons notre chemin dans le froid et le brouillard.
Au loin nous imaginons le village d’Aubrac avec ses huit habitants, perdu sur ce plateau à plus de mille mètres d’altitude, il faut être né ici pour y vivre !
Des ombres gigantesques émergent de cette mer de nuages, ce sont la domerie et la tour dite des « Anglais » . Ensemble majestueux mais très mystérieux dans ce paysage, on imagine au moyen-âge la cloche de la tour sonner en permanence par mauvais temps pour les pèlerins égarés.. .
Dans la domerie il y a une belle exposition concernant le chemin de Saint Jacques, nous allons la visiter ; cela nous permet de nous réchauffer un peu.
Aujourd’hui nous allons passer de 1300 mètres de hauteur à 300 mètres, soit une très grande descente qui nous fera passer de l’hiver à l’été. Ici, les arbres ont encore leurs habits d’hiver, plus bas c’est le printemps avec les fleurs, les arbres en feuilles, les prairies vertes où les troupeaux de vaches qui broutent.
La descente est agréable et le brouillard se dissipe pour laisser quelques taches de ciel bleu dans le ciel, la journée sera comme la descente agréable mais longue.
Nous allons traverser plusieurs villages avec des églises plus belles les unes des autres, avec des régistres où nous laissons trace de notre passage, avec des clavaires où je dépose toujours ma pierre.
Dans un village, au tournant d’une rue, il y a un abri aménagé avec une table, et sur cette table des thermos de thé, café, avec sucre, petits gâteaux…. Tout cela pour le pèlerin de passage, il suffit de se servir et de laisser une pièce. En chemin nous rattrapons Natacha et faisons un bout de chemin avec elle.
En fin d’après-midi nous arrivons à Saint Côme, village médiéval avec ses anciennes maisons accolées les unes aux autres, avec son église remarquable de part son clocher en vrille, unique en France.
Nous sommes accueillis par Bernadette qui est arrivée avant nous mais qui n’est pas dans le même gîte, nous nous faisons la bise, nous sommes contents de se retrouver, nous nous racontons nos histoires des jours précédents. Bernadette nous accompagne jusqu’au gîte, c’est une chambre d’hôte banale avec un accueil indigne sur ce chemin… mais bon cela fait parti du voyage avec ses hauts et ses bas…
Ce soir au gîte nous retrouvons les Suisses de la veille, ils s’arrêtent ici. Repas banal mais qui nous permet de discuter avec les gens autour de la table.
Anecdote : nous avons rencontré, plutôt nous avons vu les traces laissées un peu partout sur le chemin par un couple qui vient de l’Oregon ; ils tracent dans la terre leurs prénoms ou la ville d’où ils viennent !
Il y a également un couple d’un certain âge qui vient à pied de Bretagne ! Avec tente, matelas, réchaud, en parfaite autonomie.

Mercredi 30 Avril : Saint Côme d’Olt - Estaing

Ce matin après un petit déjeuner banal, pas de rencontre à se souvenir dans ce gîte, nous partons et visitons l’église de Saint Côme avant de quitter le village. Nous traversons le Lot en empruntant un vieux pont puis longeons la rivière. Il pleut et pour éviter la boue sur le chemin nous prenons une variante qui longe une route et nous amène directement à Espalion, le prochain village traversé.
Nous allons faire un petit détour pour voir une église superbe : l’église romane de Perse. Ancien bâtiment romain cédé aux moines au XI ième siècle, église d’une simplicité remarquable mais l’architecture est exceptionnelle. Nous remarquons également quelques scultures, intégrées au bâtiment, de toute beauté.
Quelle belle surprise, Bernadette accompagnée d’un pèlerin que nous avions déjà rencontré (celui qui a des problèmes de respiration et qui transporte un appareil à oxygène dans son sac) pénètre dans l’église, nous allons rester dans ce lieu tous les quatre quelques instants, le temps de s’imbiber de cette beauté.
Puis reprenons ensemble le chemin jusqu’au village d’Espalion où nous nous arrêtons déjeuner dans un petit restaurant de la ville qui ne paye pas de mine mais dont le menu est très correct.
Ambiance sympathique entre nous quatre, vers 14h nous repartons avec Bernadette qui passera l’après-midi en notre compagnie.
Le soleil commence à percer les nuages et des coins de ciel bleu apparaissent. Devant nous un bijou de l’art roman : l’église de Saint Pierre de Bussuejols. Nous restons longtemps sous le charme de cette église, nichée dans un petit vallon de verdure et de douceur. L’intérieur est aussi beau que l’extérieur, cette église comporte un étage où se situe le clocher.
Par contre la montée qui précède est très raide et glissante, il nous faudra un certain temps à glisser dans la boue du chemin avant d’arriver sur le plateau que nous traverserons avant l’étape du soir.
L’arrivée sur le village d’Estaing est magique, village médiéval qui entoure son château situé sur un éperon rocheux. Nous traversons le pont du Lot puis le village avant d’arriver à l’hospitalité Saint Jacques notre étape du soir.
C’est une belle maison, mais c’est surtout la chaleur humaine, la générosité et le partage qui l’habite qui nous va droit au cœur. L’accueil est très chaleureux, à peine rentré nous avons l’impression d’être chez soi, la maison est tenue par des bénévoles. Les offices religieux sont proposés mais non imposés, nous irons à la prière du soir.
Repas convivial dans une grande salle entre hospitaliers et pèlerins, grand moment de partage.
Bientôt nous arriverons au terme de ce périple et ce soir dans le dortoir avant de m’endormir, je pense à nous deux, Isabelle et moi, ce chemin nous a un peu réuni, ce chemin nous a apporté quelque chose que je ne sais pas encore identifier mais quelque chose de très positif pour notre couple, notre histoire, qui ne sera plus pareille après.

Jeudi 1er Mai : Estaing – Espayrac

Ce matin lever vers 6h30 pour être prêt pour assister aux laudes à 7h15, hier soir j’avais déposé une prière dans un petit coffret, une prière pour ma nièce Clara, prière qui sera dite ce matin lors de l’office religieux.
Puis petit déjeuner en famille autour d’une grande table avec les hospitaliers, Bernadette et d’autres pèlerins que nous avions déjà rencontrés d’autres jours.
Autour des confitures maisons l’ambiance est très bon enfant, familiale et décontractée. On nous suggère de prendre un autre chemin (le GR6) pour se rendre à l’étape suivante, nous gagnerions une heure de marche et 3 kilomètres. La proposition est intéressante et nous allons la suivre, Bernadette ayant réservé sur le chemin normal va nous quitter ce matin ; nous espérons vraiment revoir cette femme un jour dans la région parisienne où chez elle à Agen car ensemble nous avons vécu un moment court mais très fort.
Après avoir remercier nos hospitaliers de ce chaleureux accueil nous quittons cette maison avec un pincement au cœur.
Sur le chemin nous retrouvons Natacha accompagnée de François, un jeune qui paradoxalement n’aime pas marcher mais veut faire ce chemin et dans son intégralité ! Nous retrouvons également le couple breton, ceux qui portent leur maison ; tente, matelas, réchaud, etc.
Pour quitter Estaing nous avons emprunté un chemin assez raide qui nous conduit sur un plateau, terre d’élevage, que nous allons suivre toute la journée. Nous passerons alternativement de prairies d’élevage aux bois très denses et devrons traverser des rivières parfois à gué. Le paysage est bucolique à souhait, nous croisons de belles vaches d’Aubrac mais aussi des Normandes qui ont l’air de s’ennuyer dans ce paysage qui n’est pas le leur.
Aujourd’hui nous avons décidé de prendre notre temps en faisant plusieurs pose et une bonne sieste après déjeuner.
Vers 18h nous arrivons à Espayrac, joli village avec ses maisons anciennes toutes regroupées les unes contre les autres. Ce soir nous sommes à l’hôtel, le seul du village ; il est correct et bien tenue. Nous dînons avec Natacha qui n’est pas dans cet hôtel mais dans le gîte communal. Elle nous parle d’elle, de sa fille, de son mari et de son pays ; diner très convivial et nous nous quittons en sachant que nous ne nous rencontrerons plus sur ce chemin.

Vendredi 2 Mai : Espayrac – Conques

C’est le dernier jour de notre périple, nous aurons fait 212 km, marché 11 jours, rencontré des gens formidables ou atypiques, nous avons découvert de jolis paysages, de beaux villages, des églises remarquables où nous avons laissé trace de notre passage sur les livres d’or, j’ai déposé des dizaines de pierres près des calvaires rencontrés,.. nous avons vécu un moment unique, un moment fort, nous sommes heureux.
Aujourd’hui il nous reste 12 kilomètres, c’est une ballade après ce que nous avons fait. Nous avons des ailes, nous nous sentons léger mais avons le regret de ne pouvoir continuer et de laisser sur ce chemin tous ces pèlerins que nous avons rencontrés tous ces jours.
Dans le topo guide, il est indiqué que l’arrivée sur Conques est majestueuse et nous nous attendons à un panorama sur le village à couper le souffle… mais il n’y aura pas de panorama car celui-ci n’est visible qu’en arrivant par la route ce qui n’est pas notre cas.
Nous voici devant la pancarte : « Conques : 30 mn », nous touchons au but. Un chemin descend sur le village, les premières maisons apparaissent derrière les arbres, puis les ruelles. Ce n’est pas le panorama qui est majestueux, c’est nous notre arrivée, c’est sûrement cela qu devait dire le guide car arrivé ici après tant de pas, de sueur c’est merveilleux.
Conques est un bijou dans une verdure de montagne, j’ai rarement vu un village aussi beau avec toutes ces anciennes maisons blotties les unes contre les autres. Nous déjeunons à l’ombre d’un mur car aujourd’hui il fait très chaud. Puis allons poser nos sacs dans une auberge pour visiter l’abbatiale, magnifique construction romane, connue surtout pour son tympan représentant le jugement dernier. Nous visitons le trésor de Conques où est exposé le reliquaire de Sainte Foy.
A la sortie de l’église nous sommes envahis par une foule de touristes et allons nous réfugier dans la librairie d’à côté pour retrouver le calme.
En fin d’après-midi nous assistons aux vêpres, ce sera notre dernière prière de cette première partie de notre chemin vers Saint Jacques de Compostelle.

Il est temps de partir avec nos souvenirs mais surtout avec l’envie de revenir bientôt pour continuer le chemin car ce n’est pas nous qui faisons le chemin mais le chemin qui nous fait

21 Avril: arrivée au Puy en Velay22 Avril: Le Puy, cathédrale: St Jacques22 Avril: Le Puy, cathédrale: les escaliers
22 Avril: Le Puy, cathédrale: le cloitre22 Avril: Le Puy, cathédrale: le cloitre22 Avril: Le Puy, qu'il est long le chemin
22 Avril: Le Puy, le départ22 Avril: panorama sur le Puy en Velay22 Avril: église de St Christophe/Dolaizon
23 Avril: sur le chemin23 Avril: chapelle Saint Roch23 Avril: sur le chemin
23 Avril: sur le chemin23 Avril: sur le chemin23 Avril: sur le chemin
23 Avril: Monistrol d'Allier24 Avril: Monistrol d'Allier24 Avril: Une chapelle dans la montagne
24 Avril: sur le chemin24 Avril: Saugues24 Avril: sur le chemin
25 Avril: départ du refuge de Falzet25 Avril: sur le chemin25 Avril: petite maison dans la prairie
25 Avril: l'ami des bêtes25 Avril: ancienne domerie25 Avril: sur le chemin
25 Avril: la bête du Gévaudan26 Avril: Saint Alban de Limagnole26 Avril: calvaire
26 Avril: sur le chemin26 Avril: oratoire St Roch26 Avril: sur le chemin
26 Avril: sur le chemin26 Avril: que font-ils?26 Avril: sur le chemin
26 Avril: soirée aligot27 Avril: départ du gîte27 Avril: sur le chemin
27 Avril: Eglise de La Chase de Peyre27 Avril: sur le chemin27 Avril: Eglise de La Chase de Peyre
27 Avril: chapelle de Bastide27 Avril: moment de partage27 Avril: sur le chemin
27 Avril: c'est le printemps27 Avril: c'est le printemps27 Avril: calvaire
27 Avril: sur le chemin27 Avril: sur le chemin27 Avril: sur le chemin
27 Avril: sur le chemin28 Avril: ce matin il pleut fort28 Avril: l'Aubrac sous la pluie
28 Avril: église de Nasbinals28 Avril: calvaire dans la brume28 Avril: sur le chemin
28 Avril: sur le chemin28 Avril: silence de la solitude29 Avril: la domerie d'Aubrac
29 Avril: la domerie d'Aubrac29 Avril: la domerie d'Aubrac29 Avril: sur le chemin
29 Avril: arbres dans le brouillard29 Avril: arbres dans le brouillard29 Avril: descente dans la vallée du Lot
29 Avril: retour du printemps29 Avril: retour du printemps29 Avril: sur le chemin
29 Avril: halte près d'une ferme29 Avril: pont sur le Lot29 Avril: sur le chemin
29 Avril: sur le chemin29 Avril: sur le chemin29 Avril: sur le chemin
29 Avril: sur le chemin29 Avril: village accueillant29 Avril: ruisseau tumultueux
29 Avril: Saint Côme d'Olt29 Avril: Saint Côme d'Olt30 Avril: Saint Côme d'Olt au matin
30 Avril: pont sur le Lot30 Avril: le lot rougit par la terre30 Avril: église de Perse
30 Avril: église de Perse30 Avril: église de Perse30 Avril: église de Perse
30 Avril: petit pont30 Avril: Espalion30 Avril: Espalion
30 Avril: Espalion30 Avril: Espalion30 Avril: merci Bernadette
30 Avril: Saint Pierre de Bussuejols30 Avril: Saint Pierre de Bussuejols30 Avril: Saint Pierre de Bussuejols
30 Avril: Estaing et son château30 Avril: Estaing et son château1er Mai: notre gîte à Estaing
1er Mai: sur le chemin1er Mai: un village traversé1er Mai: sur le chemin
1er Mai: sur le chemin1er Mai: sur le chemin1er Mai: sur le chemin
1er Mai: sur le chemin1er Mai: je pose ma pierre1er Mai: Espayrac
1er Mai: sur le chemin2 Mai: sur le chemin2 Mai: bientôt l'arrivée
2 Mai: descente sur Conques2 Mai: ruelle dans Conques2 Mai: ruelle dans Conques
2 Mai: abbatiale Sainte Foy2 Mai: place de l'église2 Mai: abbatiale Sainte Foy
2 Mai: abbatiale Sainte Foy2 Mai: abbatiale Sainte Foy2 Mai: abbatiale Sainte Foy
2 Mai: le curieux de Conques2 Mai: bientôt de retour sur le chemin

Mis à jour le 25 Septembre 2008

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