Gens de la rando !

La piste cyclable qui va de St Rémy à Chevreuse est bordée d’un paysage bucolique, comme s’il nous présente le parfum du temps annoncé. Des vaches paissent paisiblement dans les champs. La forteresse de la Madeleine perchée sur sa falaise nous observe à la dérobée. Un voile de brume s’immisce dans l’athmosphère. Mais le soleil a tôt fait de le disperser. Les randonneurs empruntent une rue bordée d’élégants tamaris roses et de lilas mauves. La rue des petits ponts canalise une dérivation de l’Yvette. Des ponts de fer, de bois ou de maçonnerie amarrent la ruelle aux maisons et à la ville. Le séchoir à peaux rappelle l’existence de tanneries dans l’ancien temps. Au lavoir on franchit un pont à arche de pierre pour pénétrer au cœur de Chevreuse.

Une étroite ruelle fichée entre les hautes maisons de la place des Halles se faufile jusqu’au chemin qui part à l’assaut de la forteresse. Regardez les lilas ! Dit Nicole. Des anfractuosités du mur de soutènement, comme si le printemps était affolé de ne savoir quoi féconder, des branches de lilas percent le mortier. Mais les randonneurs grimpent, ils avalent les marches à grand battement qui mènent au pied des courtines. Soufflons un peu ! On est sur la terrasse qui domine les toits et le clocher de Chevreuse. Le chemin de notre poète part d’un muret porteur de tendres glycines mauve pastel.
Que je me plais sur ces montagnes
Qui, s’élevant jusqu’aux cieux
D’un diadème gracieux
Couronnent ces belles campagnes. Jean Racine 1661.

La plaine de la Madeleine est traversée par un sentier tracé entre un champ de colza et l’étendue de terre d’un champ fraîchement labouré. Les randonneurs glissent sur la boue et sautillent sur les touffes d’herbe. Des papillons volètent au dessus des fleurs jaunes. La forêt de la Madeleine, un peu plus loin, descend vers le Rhodon, toute en sous-bois clairs, imprégnée des odeurs d’humus annonciatrices du marécage. Anne-marie découvre des touffes de prêles, semblables à des tiges hérissées de longs poils ébouriffés qui sortent des mares stagnantes. Sur les talus des tiges feuillues recourbées protègent des grappes de muguet sauvage, le sceau-de-salomon. Le chemin remontant le ruisseau est un tunnel de végétation, entrecoupé ça et là de maisons abandonnées au bord d’un étang à nénuphars, et de moulins à demi cachés.
Des cavaliers souriants, ou hautains concentrés sur leur monture croisent les randonneurs. Il faut contourner le site de l’abbaye, fermé à notre arrivée, pour grimper sur l’autre versant jusqu’aux Granges de Port-Royal. Là même où les maîtres enseignaient à Jean Racine en français. Les randonneurs pique-niquent au bord du chemin de la forêt attenante derrière les Granges. Comment faire la sieste hélas ? En redescendant le sentier forestier on gagne le chemin Jean Racine à l’amont du Rhodon. Il serpente jusqu’au pied des Cent-Marches creusées par les Solitaires pour joindre l’abbaye aux Granges. En contrebas la vue est d’une saisissante profondeur. L’oratoire de Port-Royal-des-Champs se détache au milieu d’une vaste pelouse. On entre dans le domaine par la porte de Longueville.

Des arbres délimitent les contours des bâtiments abbatiaux. Les randonneurs arpentent la Solitude et longent le canal pour sortir de Port-Royal. Cette fois ci ne quittons plus le chemin du poète ! On traverse les paysages agrestes de St Lambert : des vaches et leurs veaux nous regardent passer d’un œil amusé. Un cheval s’ébroue dans une autre prairie. En sortant du bois de Chevreuse on entre dans la ville par la rue de Versailles. Les randonneurs ont fait un bel effort ! Jean Racine faisait cela tous les jours !? Allons on pourrait boire un coup au cabaret du lys comme lui !? Las, il n’y a plus de chopines mais juste une plaque commémorative.
Pourquoi les gens marchent-ils ? Que cherchent-ils dans les abbayes endormies ? La mémoire enfouie ou les pas des marcheurs d’autrefois ? Car le temps passe et ne revient pas.

Alain, Elisabeth, Jean-Louis, Anne, Mado, Véronique, Marie-Hélène, Xavier, Martine, Cathy, Jean-Yves
Claudine, Nicole, Rocha, Catherine, Nicole F, Agnès, Anne-Marie