Retour archives

CR
Imprimable

Défilement diaporama

Samedi 10 septembre : Dans la ville de Foix

Le train arrive en gare de Foix au petit matin. La gare est illuminée, mais vite désertée des rares voyageurs nouvellement arrivés. Les randonneurs partent dans la nuit en longeant la rivière Arget. Ils entrent dans Foix par un vieux pont jeté sur la rivière. Une lumière orangée se diffuse dans les ruelles silencieuses. Des silhouettes furtives passent rapidement. Une incertaine odeur de pain chaud se répand. Foix dort encore. Et les randonneurs squattent une placette attendant son réveil.
Notre gîte est le centre Léo Lagrange, les ruelles le bordant débouchent toutes au pied du roc sur lequel est perché le Château de Gaston Phoebus.

En bons touristes, les futurs randonneurs visitent les recoins du château. Ils explorent la salle basse, il y a une exposition sur Foix et son histoire, une salle d’armures. Ils montent l’escalier en colimaçon jusqu’au sommet d’une tour, redescendent et remontent à une autre. A chaque étage des tours sont exposés divers thèmes : Construire au Moyen Age, Henri IV et les guerres de religion, L’imaginaire médiéval, le Moyen Age dans la BD.

Les toits de Foix étendent leur camaïeu de tuiles rosâtres. L’église abbatiale St Volusien émerge massivement. Les ardoises couvertes de lichens de son toit tranchent au milieu des tuiles canal.
Les montagnes environnantes sont couvertes de fins filets de brume. Les sommets disparaissent dans les nuées. Quelques rocs se détachent de leur masse sombre.
Le Pain de Sucre est comme souligné pour bien se faire voir.

Profitons de ces instants à part pour parcourir les rues de Foix, lécher les devantures des vitrines : les magasins de vêtements élégants, les brocanteurs, le cybercafé, les pâtisseries à croustades, les librairies et les salons de coiffure.
Quand l’expédition commencera vraiment c’en sera fini de tout cela !

Dans la cour du Léo Lagrange des randonneurs sont en train de ranger leurs affaires dans leurs voitures. Ils viennent de la région parisienne. Ils ont le visage souriant, hâlé, presque rougi par les coups de soleil. Ils ont fait un autre itinéraire pyrénéen que le notre et en sens inverse, la semaine passée. Ils décrivent les orages, la pluie et la boue rencontrés. Ils rient au souvenir de leurs vicissitudes. D’autres randonneurs préparent un van pour le lendemain, ce sont des anglais, ils vont suivre notre chemin quelque peu

Le soir venu Michael et votre rapporteur déambulent jusqu’au centre de Foix. Des gens sont attablés sur la terrasse des cafés, ou assis sur le rebord du carreau de la Halle. Les deux promeneurs s'en retournent un peu plus tard, ils voient le château illuminé par-dessus le faîte des maisons.

Dimanche 11 septembre : A travers la forêt moussue

Les randonneurs traversent l’Arget par le vieux pont, empruntent sur la gauche la rue montante Ste Rapine.
L’Aventure commence !
Oh ! Dit Michael, on vient de laisser passer le chemin du Pech ! La belle équipe fait demi tour pour le rejoindre.
Mais oui ! Le GR107 à bandes jaune et rouge carmin (ou marron) se dissimule dans un recoin. Le « Pech » est le terme occitan du mot français « Puy » qui veut dire : Montagne.
Le chemin grimpe âprement. Mais la journée est belle, le soleil point trop farouche.

L’humidité est présente. Les fortes pluies passées sont à peine résorbées. Alain A. repère déjà quantité de champignons.
« Des coprins » Dit-il en montrant de petits capuchons blanchâtres rabattus jusqu’à l’humus du sol.
Les champs, les pâturages sont verts. Les montagnes bleues les bordent en ondulant doucement. Leur faible altitude les couvre d’arbres qui les adoucissent. Le « Cami dels Bons Homes », le chemin des Bons Hommes, et des Bonnes Femmes, en occitan était celui emprunté par les Bons Chrétiens, et les Bonnes Chrétiennes, fuyant l’inquisition.

Les randonneurs s’arrêtent dans un champ pentu pour souffler un peu. Jean-Claude livre les informations de son GPS, nous avons grimpé d’emblée 400m de dénivelée positive. Pas mal pour un début !
Au col de Porte (793m) nous pénétrons dans une forêt de hêtres aux troncs clairs et élancés et au feuillage léger. Des véhicules tous-terrains sont tapis dans les virages, ils portent une pancarte « Tir à balles » ! Des chasseurs traquent les sangliers. Ne quittons pas le sentier. Des amas de roches moussues sont parfois calés entre les troncs.

Les cathares, ainsi seront appelés les hérétiques bien après la croisade, administraient le consolamentum par imposition des mains. Il ne fallait pas rompre ce serment sous peine de voir son âme revenir dans une autre enveloppe mortelle ! Dis je.
Oh oh. Répondit Jean-Claude

Le chemin s’enfonce dans la boue par instants. Même avec nos goretex les pas sont hésitants. On s’enfonce facilement dans des plaques gluantes et glissantes.

Le pog de Roquefixade surgit à l’horizon comme une dent plantée dans une gencive verte. L’arête du pog est barrée d’une ligne horizontale rectiligne. On a l’impression de voir une crête du château. Au fond de l’horizon montagneux on distingue un cône, le pog de Montségur.
On prend des chemins de traverse par les champs, enjambant les clôtures électrifiées d’une manière ou d’une autre.
Le gîte de Roquefixade, le « Relais des Pogs » se trouve dans un bourg attenant à Cazals. L’accueil est bon enfant.
Les randonneurs rangent sagement leurs chaussures dans l’escalier du vestibule.

Nos anglais de Foix sont déjà là et sirotent une bonne bière sous la tonnelle. Venez vite nous rejoindre s’exclament-ils !

Le dîner est copieux :
Salade de tomates et pâté de foie maison (extra !)
Paella (faite avec amour par le patron)
Gâteau au chocolat

Nous sommes prévenus : c’est saucisse-lentilles tout au long du chemin des Bons Hommes dit notre hôte malicieux.

Lundi 12 septembre : Le champ de seigle

Une brume légère flotte sur les collines ce matin. La nuit a été pluvieuse, mais le temps s’éclaircit. Les randonneurs retrouvent leurs chaussures mélangées sur l’escalier. Un lutin farceur nous souhaite le bonjour ? Les randonneurs s’y trompent-ils ? Allons ! Ils reprennent le chemin de Roquefixade de bonne humeur.
Le village est encore endormi, il n’y a pas âme qui vive. Les ruines du château veillent du haut du pog dominant.
Il a été démantelé sous Louis XIII, au XVIIe siècle, qui le trouvait trop menaçant après la conjuration de Montmorency.

La place est silencieuse, des maisons basses et claires entourent la fontaine et un arbre de la Liberté ( ?) solitaire. La mairie porte ‘La Communa’ inscrite sur son fronton, est- ce de l’occitan ?
Au détour d’un sentier un monument surgit avec une flamme brandie à bout de bras !
La bataille de Roquefixade contre l’armée Allemande et la milice de Vichy a été cruelle pour les maquisards. Les FTP de la 3101e compagnie « Raoul Bonnafous » y laissèrent 16 des leurs. Un juif Allemand ou Autrichien, réfugié chez eux y laissa la vie lui aussi. Ce chemin est lourd du pas des hommes en lutte.

Bientôt le sentier, à travers bois et pacages, coupe sans cesse ruisseaux et torrents. La boue collante et glissante est omniprésente. Les randonneurs sont concentrés sur leurs pas pour éviter les passages difficiles, les fondrières traitreuses. Votre narrateur fait la culbute les pieds en l’air ! Il y en a qui trichent et font de larges détours derrière les arbres en catimini !
On entend les cloches des troupeaux au fond de la vallée !

Le chemin pierreux est de retour dans la descente sur Montferrier, on dévale à toute allure pour rejoindre le village. Une boulangerie-épicerie est encore ouverte ! Nous sommes sauvés ! C’était juste car il n’y a plus rien à manger, il n’y avait aucun ravitaillement depuis Foix.
L’estomac rempli, nous voyons Monteferrier comme un charmant village au bord du torrent Le Touyre.
Les randonneurs montent maintenant d’un pas alerte le Cami dels Bons Homes. Le chemin est raide mais pierreux, il est facile à grimper. On débouche sur le col du Séguela. C’est le champ de seigle en occitan.

Montségur surgit brutalement campé sur son pog. « Pog » vient du latin « Podium », c’est un terme occitan employé dans la Chanson de la Croisade pour signifier Montagne.
Une stèle est dressée au pied du pog, elle a été érigée en 1960 par la Société d’Etudes Cathares ! L’inscription porte une certaine émotion : « Als Catars als martirs del pur amor christian ». Là est le champ des crémats où brûlèrent les 220 ‘parfaits hérétiques’. Cathares, du grec Catharos, les ‘parfaits’, est la manière dont furent appelés les Bons Hommes par leurs vainqueurs.
Le château n’est pas celui que l’on croyait ! Il a été démantelé par les croisés, et reconstruit par les Lévis-Mirepoix qui reçurent le fief après sa reddition.

Au gîte nous retrouvons nos anglais déjà bien installés. Ils ont déjà découvert la bière artisanale du coin !
On a une pensée émue pour notre hôte de Cazals quand une énorme marmite de saucisses-lentilles est déposée au milieu de la table !
Soupe de légumes (Des légumes frais !)
Saucisses lentilles (Excellentes !)
Fromage blanc artisanal et confiture de mûres

Il faut nous mettre à l’abri pour nous en retourner au gîte, deux ruelles plus loin. La pluie tombe encore !

Mardi 13 septembre : Half

L’habitude est prise de sortir le matin avec la pluie tombée la nuit durant ! Une fine bruine cette fois ci est dans l’air ambiant. Les randonneurs vont bien vite retrouver la gadoue gadoueuse, malgré une petite montée plus ou moins pierreuse. La pluie cesse heureusement. Il faut dégringoler le long du torrent de Rivels en une interminable glissade boueuse. On croise quelques uns de nos anglais en difficulté sur une plaque glaiseuse. Le torrent murmure petitement à notre droite comme pour se faire excuser. Cependant sont débit est très faible.

Tout semble se focaliser sur le sentier. On s’accroche aux arbres, on s’arc-boute sur les bâtons. L’arrivée au hameau de Pelail est surnaturelle. Nos chaussures sont des blocs de boue et on marche sur une route asphaltée !
La route des gorges de la Frau est ardue, c’est 500m de dénivelée sur une courte distance. Les gorges de la Frau ! De l’effroi ! Une légère ondée survient à l’improviste.
Certains se couvrent de leur cape. Stoïques, d’autres ne font rien. « Couvrez vous, il pleut ! ».

Et la pluie cesse.
« Il a plu, il pleuvra » Dit un des philosophes. Cela déclenche une crise de fou rire chez votre pigiste !
De splendides fleurs jaunes, semblables aux ajoncs, bordent le sentier. « Ce sont des aconit tue-loup » Dit Alain A.
Les gorges sont splendides, le torrent l’Hers a taillé une longue saignée à travers la montagne. L’Hers n’est pourtant qu’un ruisselet maigrichon. Il semble qu’il se transforme par moments en redoutable et dévastateur torrent. Il devient alors indomptable. Ainsi les gorges de l’effroi ont-elles préservé leur intimité secrète.
Le soleil brille sur la route de Comus !

Le gîte de Comus est aménagé au dernier étage de l’ancienne école communale du village.
C’est Anne qui nous accueille au gîte de Comus, elle casse du petit bois dans un abri attenant au préau. Son chien Half, un croisé de berger des Pyrénées et de patou, promène sa masse débonnaire dans la cour.
Vous savez, il n’y a pas de ravitaillement jusqu’à Merens ! Dit Anne, je peux vous emmener en voiture à l’épicerie de Camurac

Aïe, aïe ! Etablissons vite une liste de provisions
Du jambon, du pain, des fruits, des tomates, du fromage !
Des œufs, pour faire des œufs durs ! Dit Cathy
Des bières pour ce soir ! Dit Michael
Alors allons-y ! Dit Anne
Half grimpe dans la camionnette et étale son pelage blanc en travers du plateau. Michael et le journaliste s’installent sur les gardes boues des roues arrière. Anne et Agnès sont sur les sièges devant. La camionnette nous emmène en brinquebalant. On voit s’éloigner Comus à travers la vitre des portes arrière, les cols, les pâturages et la foret de Prades. Nous nous agrippons aux parois, Michael et moi. On rit avec jubilation. Half nous regarde de ses bons yeux à travers ses poils.

Au dîner de joyeux convives se joignent à nous : Peter, un anglais, deux spéléos et deux autres randonneurs .C’est un dîner splendide concocté par Anne avec amour.
Soupe de pois cassés au lard (Sublime !)
Lasagnes au bœuf et champignons (C’est trop !)
Fromage (Encore une petite place !)
Tarte aux abricots

Ma conversation est animée ! Peter est intarissable sur son amour du pays de Sault ! En Angleterre, dit-il, les gens connaissent ‘Montaillou’ le livre de Leroy-Ladurie. C’est un sujet qui passionne les Anglais. Ils raffolent des amours de Béatrice de Planissoles et de Pierre Clergue.

Mercredi 14 Septembre : Le pays d’Aillou

Le ciel est pur et le soleil rase les prairies. Il est encore à demi occulté par les crêtes des montagnes. Des lambeaux de brume surnagent au dessus de l’herbe humide de rosée. Des toiles d’araignée brillent de gouttelettes, tendues entre les tiges des fleurs des champs. Les randonneurs sillonnent un sentier vert qui suit la houle des prés et des pacages. Des colchiques mauves saluent le jour nouveau. En vue de Prades, un tracteur herse quelques lopins de pâture future.

Il faut descendre jusqu’au fond du vallon, ouvrir une barrière, passer et la refermer derrière soi, pour se retrouver sur la montée vers Montaillou.
Une petite montée point trop méchante.
Le regard embrasse Prades, Comus et Camurac qui paraissent délimiter les quatre coins d’un plateau du pays d’Aillou, avec Montaillou. C’est un endroit très isolé.

Montaillou ! Montalion en occitan, rendu célèbre par les archives de la procédurière Inquisition, qui traqua et consigna les moindres soupirs des malheureux villageois.
Raymonde Marty de Montaillou racontait :
‘Guillemette me dit :
- As-tu vu les Bons Hommes dans la maison de ton père ?
- Oui, répondis-je
- Ces Bons Hommes, me dit alors Guillemette, sont bons chrétiens. Ils tiennent la foi romaine qu’on tenue les apôtres’

Le château n’a plus que quelques pans de mur d’une fragilité dérisoire. La fount de Rivel est joliment restaurée, elle offre son eau fraîche dans un bassin ombragé à la sortie de Montaillou. Les fontaines autrefois centres de convivialité étaient devenues des abreuvoirs pour les bêtes. Elles ont été finalement détériorées.
Le chemin aride monte en serpentant à découvert jusqu’au col de Balaguès. Les versants sont râpés, mais quelques fleurs émergent ça et là. La gentiane bleue ou la chicorée sauvage au bleu pâle.

Le col de Balaguès fait 1669m ! Le panorama offre les vallons, les sommets Pyrénéens et le cône pointu de la dent d’Orlu.
Des troupeaux de vaches paisent en liberté sur les flancs ensoleillés de l’autre côté du Balaguès. Des groupes de chevaux font bande à part.
Alain A avise un buisson à l’écart du sentier : il y a des fleurs d’aconit napel vénéneuses, une seule suffit à tuer un cheval !
Au plan de Lagarde on descend vers Ascou, la forêt approche, sans doute est-ce une hêtraie. Une buse plane lentement au dessus de la cime des arbres.

L’étape du soir nous mène au gîte des Granges d’Ignaux.
C’est une belle maison rustique restaurée avec goût.
L’accueil de Laetitia et d’Olivier est élégant. Le jovial gardien des lieux est un adorable berger des Pyrénées, Ticky redoutable chercheur de câlins.

Au menu
Salade de gésiers (Raffiné !)
Bourguignon (Succulent !)
Fromage
Tarte aux poires et au sucre

Jeudi 15 septembre : L’omelette aux cèpes

Les randonneurs ont le cœur joyeux avec la belle journée qui s’annonce. Depuis un certain temps tout le monde a oublié la terre boueuse du début, les souliers et le pantalon crottés. Le sentier est clair et caillouteux. On traverse Ascou sans rencontrer âme qui vive. Sinon quelques chats silencieux au détour de ruelles.
Le sentier zigzague jusqu’à la Porteille d’Orgeix, c’est un petit col qui passerait inaperçu sans le panneau le signalant. En contrebas Orgeix (823m) rutile sous le soleil. La rivière Oriège le traverse. Le sentier caillouteux en lacets descend vers le village.
La charmante église d’Orgeix est bâtie au bord de l’Oriège, à gauche un pont de pierre à deux arches enjambe la rivière.

Le chemin de l’autre côté du pont monte à travers le forêt domaniale d’Orgeix. De beaux murs moussus scandent les tournants. Les blocs de pierre sont adroitement ajustés sans maçonnerie, comme un mur étrusque. La montée est éprouvante cependant. Les randonneurs pique-niquent au bord du ruisseau qui descend vers l’Oriège, ils n’ont même pas le temps de faire une petite sieste reposante. La montée en lacets reprend incessante. Ils sont tendus en avalant les tournants, jusqu’à la ligne de crête qu’ils longent dans un étroit couloir. Soudain, la foret se dissout sur les pâturages du col de Joux (1702m).

La vue est splendide sur les vallées et les montagnes : le pic de l’Estagnas, le pic de l’Homme et le pic des Perdrix.
Ce sera ta nuit ! Dis je à Alain A, astronome à ses heures, la nuit de la voie lactée peut-être !
De l’autre côté de la foret Merens nous attend ! La foret de sapins est ombragée, chaude et humide.
Un cèpe tête-de-nègre ! S’écrie Alain A.
Un autre cèpe magnifique offre son petit ventre blanc bien renflé. Michael le photographie avec délicatesse. Un autre encore ! Nous voilà parcourant les pieds des sapins dans le sous bois moussu à la recherche des précieux champignons. Nous avons laissé les filles et le chef continuer leur chemin.

Nous arrivons à récolter un beau sac de deux à trois kilos de cèpes. Tous farauds nous sommes, fiers de notre trouvaille. On va se passer le portage du sac à tour de rôle. Il faut vite rattraper les autres maintenant.

La patronne du gîte de Merens-du-Haut, est la sympathique et serviable Steffi. Une fois notre liste de provisions faite, elle emmène Agnès faire les courses à l’épicerie de Merens-du-Bas. Il y a quand même un bon quart d’heure pour faire le trajet en voiture. Les deux jours suivants de la randonnée seront complètement à l’écart de tout ravitaillement.

Ceux qui restent, bien tranquilles, vaquent aux occupations habituelles : le barbe à raser, la douche, la lessive. Mais Cathy et Alain A épluchent les cèpes pendant ce temps. Plus tard Alain mettra à mijoter les morceaux de cèpes, avec des gousses d’ail, dans une grande poêle. On n’avait pas oublié de rajouter des œufs dans la liste des provisions à faire. Et quand les cèpes seront à point, Alain cassera les œufs au dessus pour lier les cèpes avec l’omelette. On la mangera en pique-nique demain !

Mais allons faire honneur à Steffi qui a préparé notre dîner.

Là encore plusieurs randonneurs sont attablés et les conversations vont bon train.
Soupe minestrone aux légumes frais.
Saucisses et côtes de porc avec gratin dauphinois.
Glaces pistache, poire et chocolat.

Steffi nous sert une tisane « pisse mémère » de sa composition, elle cueille les herbes sur les flancs de la montagne : verveine, marjolaine et thym.
Une grande baie vitrée borde la salle, elle plonge sur les ténèbres de la vallée.
Dans la nuit étoilée, Alain A sort son crayon laser pour cibler Acturus, Véga et les trois belles d’été.

Vendredi 16 septembre : L’eau des sources

Les randonneurs ont plaisir à remplir leurs bouteilles, leurs gourdes à la fontaine. L’eau des sources des Pyrénées est fraîche et pure. La fontaine de Merens-du-Haut est construite au bord du GR10 qui grimpe vers la Porteille des bésines, juste après les belles ruines de l’église romane St Pierre.
Cette fois nous disons adieu au Cami dels Bons Homes, on prend la déviation du col des Bésines. La montée démarre abruptement. Un panonceau indique « Source chaude ». Bientôt les randonneurs passent devant un trou d’où surgit un petit filet d’eau. Tout le monde y passe la main. La source n’est pas froide sans plus !

Mais ce n’était pas la vraie source, juste une résurgence. Plus haut de vastes bassins contiennent une eau très chaude. De temps à autre des remontées de bulles crèvent la surface quiète. Une odeur pestilentielle se répand : la source vient de lâcher un « pet de souffre ». Les randonneurs restent un bon moment songeurs devant ce mystère de la nature.
La montée reprend sur le chemin caillouteux. Il faut parfois escalader des rochers. On longe continuellement le ruisseau du Nabre. Une jolie cascade agrémente cette ascension, c’est le « Saut du Nabreil ».

« Une marmotte ! ». Les randonneurs sont saisis de voir le tendre animal surgir au dessus d’un rocher. « Je retourne me coucher ! » Dit-il pour finir.
Le petit lac d’Estagnas a un petit air de rivage méditerranéen. Des pins se dressent et se mirent sur son miroir d’émeraude. Les montagnes qui nous environnent sont dénudées. Maintenant nous gravitons à des altitudes de 2000m au plus. C’est de la pure montagne. Un couloir se fraie entre les rochers jusqu’à la Porteille des Bésines (2333m). La plus haute altitude de notre randonnée Pyrénéenne.

Le pic d’Estagnas domine la Porteille fièrement dressé à notre gauche. Le regard porte sur une large vallée : le pic d’Auriol (2695m) monte la garde devant la Porteille, son frère le puig Pedros lui fait face de l’autre côte de la vallée. Tout autour s’étendent des silhouettes gris mauve dégradé des chaînes des cols, des pics et des serras.
Les randonneurs dévalent la coulée qui descend jusqu’au plateau de tourbières. Des buissons de genévriers et de rhododendrons ponctuent les tours et détours du sentier vers le refuge. On enjambe quelques flaques. L’eau suinte en rigoles, sur les pierres, entre les arbustes. On aperçoit le lac des Bésines caché jusque là par un coude au pied du pic d’Auriol.

Un âne placide nous accueille à l’entrée du refuge des Bésines. C’est un refuge géré par le Club Alpin Français.
Des ânes font l’aller-retour entre le refuge et L’Hospitalet en cinq heures pour ramener les produits de première nécessité. Un placard affiché à l’entrée nous averti : « Les refuges ne sont pas des hôtels, mais des étapes accueillantes au service des randonneurs ». Nos hôtes sont d’ailleurs très charmants.
Soudainement le temps se gâte, il fait froid, le brouillard envahit la vallée. Le puig Pedros se voile rapidement à nos regards. De la fenêtre du refuge nous nous voyons encerclés par un halo d’épaisse purée de pois.

Passons à table pour se réconforter !
Consommé de volaille au vermicelle
(Super requinqueur !)
Bourguignon, purée
(Sublime ! La patronne est fière d’elle à juste titre)
Fromage
Salade de fruits (Merci l’âne !)

Samedi 17 septembre : Sous la pluie battante

Le refuge des Bésines se réveille sous la pluie battante. Toute la vallée est noyée dans la brume. Cependant la pluie dilue les filets de brouillard. La randonnée va devoir être raccourcie à cause du mauvais temps. Il faut descendre directement à L’Hospitalet. Les randonneurs hésitent un peu avant de se lancer hors du refuge. Les capes sont sorties et tout le monde se harnache. Allez ! On y va ! Au revoir l’âne !

L’eau tombe, coule, suinte, jaillit de tous côtés. Les rochers glissent. Une nouvelle fois votre pigiste se retrouve les pieds en l’air ! Il est difficile de garder son équilibre, de mettre les pieds sur quelque chose de stable et de garder un œil sur le GR ! Des ruisselets envahisseurs, voire des cascatelles bondissent sur les versants. Les filets d’eau convergent vers le lac au fond du vallon.

De courageux pêcheurs tendent leurs lignes au bord du lac. Mais ils peuvent s’abriter dans une cabane non loin, la porte entrouverte montre une cheminée où crépite un feu de fagots. Le lac est fermé par un barrage EDF, ce doit être là l’origine de ce lac.
Les randonneurs continuent bravement à affronter les précipitations. Il faut franchir des torrents encore, traverser des forêts, s’agripper aux arbres pour ne pas glisser dans la boue. Des grandes cascades se précipitent des falaises.
Bientôt les marcheurs murmurent « On entend des voitures ! On entend des trains ! » Revoilà la civilisation.
Le soleil daigne réapparaître tandis que nous descendons sur L’Hospitalet-près-L’Andorre.

Alors nous prîmes le train et retournâmes à Foix.

Pierre Maury de Montaillou, parlant de son âme, disait à l’inquisiteur Jacques Fournier :
« Jusqu’à ce qu’elle parvienne dans un corps où elle est sauvée, parce qu’alors, étant finalement hérétiquée, elle est mise dans l’état de la justice et de la vérité… Mais jusqu’à l’hérétication, les esprits sont condamnés à vaquer de tunique en tunique ».

Michael
Jean-Claude Alain A Jean-Yves Le Chef Cathy
Agnès

La faune et la flore du chemin des Bons Hommes :

Mis à jour le 5 Octobre 2005

© 2005 Club sportif IBM Paris - Section Randonnée Pédestre